Pour mémoire, depuis le début de l’année 2015,le tribunal des affaires de Sécurité sociale de Lyon a enregistré, tous contentieux confondus (reconnaissance maladies professionnelles, accidents du travail et mise en cause de la responsabilité de l’employeur dans la survenance des lésions), près de 250 demandes. Cet été, on a cru, à tort, à une révolution possible dans le monde en pleine ébullition des risques psychosociaux en imaginant que l’Assemblée nationale allait voter l’inscription du burn out dans le tableau des maladies professionnelles. Les maladies dites psychiques allaient enfin être ajoutées à la sacro-sainte liste des maladies professionnelles qui ne comporte toujours que des affections d’ordre physique. Mais il n’en fut rien.
Si le législateur a finalement retenu, dans le cadre de la loi, le principe de la reconnaissance des maladies psychiques comme maladies professionnelles, laissant au pouvoir réglementaire le soin de déterminer les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers, il ne les a pas pour autant inscrites aux tableaux des maladies professionnelles.
Et c’est bien là une différence de taille ! Il existe une centaine d’affections inscrites au tableau des maladies professionnelles. Pour chacune sont précisés les symptômes ou les lésions que doit présenter le malade, les travaux ou professions susceptibles de provoquer l’affection, ainsi que le délai de prise en charge de la maladie correspondant au délai maximal entre la date à laquelle le travailleur a cessé d’être exposé au risque et la constatation de l’affection. Si tous les critères prévus dans le tableau sont remplis, la reconnaissance est alors automatique. Par contre, si la pathologie ne répond pas aux conditions fixées, ou si elle n’est pas désignée dans un des tableaux, la demande de prise en charge du salarié s’effectue devant un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles dit « CRRMP ». La procédure à engager est donc complexe et la reconnaissance d’autant moins automatique. Pour que l’épuisement professionnel soit reconnu comme maladie professionnelle, il faut impérativement avoir un taux d’incapacité d’au moins 25%, ce qui est anormalement élevé !
On ne peut donc pas en France, à ce jour, faire reconnaître comme maladie professionnelle son épuisement professionnel, conséquence directe de la montée en puissance du stress au travail, quand bien même celui-ci est avéré, si l’on a des séquelles qui n’atteignent pas 25 % d’incapacité. Pire, on sanctionne le salarié qui, à la suite de son burn-out, a su, ou pu, trouver les ressources personnelles ou professionnelles, lui permettant de limiter ses lésions, mais qui n’atteindront pas de ce fait les 25 % exigés. Reste la possibilité, plus ardue encore, de faire reconnaître son burn-out comme accident du travail, qui n’exige pas de condition relative à un taux minimum d’incapacité, mais qui impose une soudaineté de la lésion survenue à une date certaine, délicate la plupart du temps à établir s’agissant d’un syndrome d’épuisement professionnel qui se manifeste plus généralement de façon lente et progressive. Espérons donc que les décrets d’application à venir sauront enfin réparer cette injustice !